La GOUVERNANCE FINANCIÈRE PME

François Morency, B. Ph., MBA AVISO, les conseillers financiers

Par: François Morency

Notre vision de l’économie s’est concentrée sur les entreprises en démarrages ainsi que les PME performantes. Très vite, nous avons compris qu’il existait au moins trois catégories de dirigeant d’entreprise :

 Gestionnaires de revenus : ils sont qualifiés de vendeurs qui pourraient vendre « un frigo à un esquimau ». Mais il ne faut pas croire qu’il est facile de berner les gens. Ces vendeurs sont prêts à tout pour réaliser une vente. Ils rognent les marges, ils offrent des escomptes ou des accessoires gratuits. Leur fierté se limite à grossir les revenus pour XXX milliers ou millions de dollars.

 Gestionnaires de dépenses : comme de vrais comptables, ils minimisent les dépenses, sans tenir compte de ce qui pourrait être réinvesti pour améliorer l’entreprise. On raconte qu’un bureau de comptable demandait à ses employés de rebobiner les rubans papier des calculatrices en fin de journée afin de les réutiliser le lendemain.

 Gestionnaire de profit : ce dernier s’occupe de la relation entre les revenus et les dépenses afin de générer des profits. Ce gestionnaire doit comprendre le rôle économique de son entreprise c.-à-d. sa contribution réelle à la société afin de saisir son opportunité. La mission d’une entreprise est de mobiliser suffisamment de clients pour assurer la contribution rentable de cette société à sa communauté.

En définissant les gestionnaires de cette manière un peu ironiques, le choix devient simple. Nous voulons tous devenir des gestionnaires de profit. Que veulent bien dire faire des profits ? En se référant à Statistique Canada, il est facile de se comparer à la moyenne canadienne pour son secteur d’entreprises. À titre d’exemple, une entreprise de services peut se contenter d’une rentabilité de 5 ou de 10 %. Plusieurs seront heureux de réaliser un tel profit et même être considérés comme des leaders dans leur secteur d’activité. Comme un manège, ils font le même tour chaque année sans se poser de question. Si une personne ose leur dire qu’ils pourraient faire du 20 ou du 30 % de profit par année, ils la traiteraient de folle et d’incompétente. Comme la terre tourne comme une boule, ces niveaux de rentabilité peuvent être atteints. La condition est de faire un plan de match pour y arriver.

Le Budget
Un comptable professionnel affirmait que les budgets étaient inutiles parce qu’aucun budget ne pouvait correspondre à la réalité. Quelle erreur ! Le budget n’est pas une tentative de prévision des revenus et des dépenses, car cela revient au manège qui tourne en rond, sans aucun avenir. Il est facile de prendre l’état financier de l’année précédente et de l’augmenter de 5 % tant au niveau des revenus que des dépenses. Ce jeu devient la simple répétition de ce qui a toujours été fait : une continuité. Mais ce n’est pas la raison d’être d’un budget. Le budget est un plan de match.

Le budget vise à développer les moyens d’atteindre des objectifs. Nous devons définir des objectifs pour élaborer le budget. Sans objectifs, l’entrepreneur constate ce que le comptable affiche dans ses états financiers. Comme un médecin légiste, le comptable constate ce qui est arrivé. En fixant différents objectifs comme: la rentabilité par secteur de l’entreprise, la part de marché pour son rayon d’action, le contrôle de la marge bénéficiaire, le programme d’investissement, la réduction des accidents de travail, le recrutement du personnel, le développement de nouveaux produits/services… Tous les objectifs de l’entreprise doivent être mesurables et intégrés dans le plan de match qu’est le budget.

Que penseriez-vous d’une entreprise dont les revenus stagnent entre 4 et 5 millions de dollars par année ? Un des propriétaires de cette entreprise s’occupait de la production et des ventes. Quand il y avait trop de production, il relâchait les ventes, et inversement. La croissance de l’entreprise s’embourbait parce qu’il n’y avait pas de travail soutenu de vente ni de supervision continue de la production. Personne n’avait de véritables objectifs, mais tout le monde voulait faire grandir l’entreprise. La frustration de la stagnation devenait le pain quotidien des propriétaires. Rien n’arrive par accident !

L’exercice du budget est l’élaboration du plan de match pour atteindre les objectifs définis. Il faut rendre imputables tous les responsables – de chaque secteur – pour l’atteinte de ces objectifs avec les moyens définis. Les objectifs doivent également concourir à la mission et à la vision de l’entreprise. Que penseriez-vous d’une entreprise de préfabrication d’unités visant à être le leader au Québec alors que la présentation de ses modèles démontre un manque d’entretien et de finition ? La cohérence de l’entreprise doit se refléter dans tous les aspects de ses opérations.

Les rapports financiers
Tous les mois, le service de comptabilité de l’entreprise doit générer un état financier mensuel et comparer au budget ainsi qu’un cumulatif annuel. Les chiffres doivent être mis en pourcentage des ventes afin de faciliter la lecture et la compréhension de l’atteinte des objets. Tous les écarts (en plus et en moins) doivent être expliqués afin de bien comprendre ce qui s’est passé durant le mois. Cette analyse permet de planifier les mesures correctives pour le prochain mois. Pour être efficaces en temps réel, les états financiers doivent être produits dans les cinq (5) jours de la fin du mois (en incluant la balance de vérification et la conciliation bancaire). En sus de ces rapports, la comptabilité prépare un sommaire du vieillissement des comptes à payer et des comptes à recevoir.

À ce contrôle mensuel, nous devons ajouter une validation des données par un comptable externe, lequel fera également les états de fin d’année. La fiabilité des données financière est essentielle au maintien de la bonne santé de l’entreprise. Des accidents de parcours arrivent souvent, même avec des gens de bonne volonté. Un exemple, un comptable interne avait omis de déclarer 200 000 $ de compte à payer ce qui a mis l’entreprise en péril lorsque cela a été mentionné. L’entreprise était déjà déficitaire avant de connaître cette omission. Le renouvellement de la marge de crédit aurait été compromis.

Dans des circonstances difficiles, nous suggérons de faire accompagner les états financiers d’une lettre de présentation. Cette communication vise à expliquer ces circonstances et soumettre des évidences des correctifs ont été mis en place ou sont en cours d’implantation. Lorsque l’entrepreneur soumet ses états financiers à son directeur de compte, la décision concernant l’évolution de la situation sera soumise à l’un ou plusieurs paliers d’approbation. La lettre de présentation a pour but de transmettre la position de l’entrepreneur aux différentes autorités qui prendront des décisions sur son avenir bancaire.

Lorsqu’il fait beau, l’entrepreneur peut croire que son banquier est presque un ami. Avec le changement climatique, il est plus facile de s’attendre à des fluctuations importantes. En Europe, il est fréquent qu’une entreprise ait deux banquiers : un principal et un secondaire. Cette pratique permet de changer plus rapidement de banquier si le temps se gâte et qu’un autre banquier vous connaît depuis un certain temps. La compétition entre les banques existe. La négociation peut vous permettre d’obtenir de meilleures offres. N’oublions pas que l’entrepreneur est la personne la plus loyale envers son entreprise : les autres sont des opportunistes capitalistes. Le capitaliste a bien été défini par Alan Greenspan (US Federal Reserve) : « Si tu me donnes ce que je veux, je te donnerai ce que tu veux. ».

La présentation financière d’une entreprise reflète le système nerveux de l’entreprise qui transmet toutes les données à la tête pensante de l’entreprise afin de faciliter la prise de décision. Notre meilleur souhait : réussissez votre plan de match !

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